LETTRE OUVERTE AU MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE
Objet : Enquêtes internationales et désaffection des enfants français pour les mathématiques
Alerte officielle
Risques : Léguer ce handicap des enfants français aux 700 millions de francophones à l’horizon 2050
Périgueux le 12 décembre 2024
A l’attention de madame Anne Genetet
Madame la Ministre,
Nous avons l’honneur de répondre officiellement au courrier du ministère en date 16 février 2022 qui fait suite à notre mise en garde du 01 septembre 2021.
Notre association, est devenue experte dans les difficultés d’apprentissage en mathématiques depuis notre publication de 2009 sur la Dyscalculie et les publications qui ont suivies. Nous avons échangé avec le ministère à plusieurs reprises et nous avons, ainsi, pu faire « bouger les lignes ». Suite à des dérives récentes, nous préparons une nouvelle étude sur la Dyscalculie » à paraître en 2025 Revue de presse (Annexe 9) qui va donner une suite à celle de 2009.
Ainsi, notre devoir est de vous alerter, à nouveau, sur un aspect ignoré des premiers apprentissages mathématiques à l’école, en maternelle et au CP. Depuis le début des années 2000, nous suivons les enquêtes internationales et nous avons tout étudié, les programmes, la pédagogie, les budgets. Nous connaissons toutes les raisons invoquées par les médias qui seraient à l’origine du déclin relatif des performances françaises : « la constante macabre d’Antibi, l’école jugée trop cartésienne, abstraite, autoritaire, verticale, peu stimulante, trop focalisée sur la notation … », la formation des enseignants, les budgets, ainsi que les conseils mercantiles (Méthode de Singapour, Montessori, …)
Les résultats en mathématiques des mesures de votre ministère en CP et CE1 laissent apparaître, suivant les compétences, des taux de l’ordre de 30 % d’élèves fragiles. Les mesures de la DEPP 2019, sur l’intérêt porté à la matière « Faire des mathématiques par plaisir » sont de 67 % en 2019. Nos propres enquêtes, récentes, à l’école élémentaire sont, même, en dessous de 50 %, ce qui est comparable au taux, quelquefois annoncé à la fin du collège. Selon nous, c’est un point crucial, image du découragement des élèves.
La publication TIMSS 2023 du 4 décembre est une officialisation de cette catastrophe que nous annoncions depuis des années, depuis les premières publications TIMSS, 2015, 2019. Avec TIMSS 2023, notre situation internationale empire.
Tous les citoyens ne peuvent être que surpris et tristes à la lecture du tableau présentant le classement de Pisa 2022 et le classement TIMSS 2023 (Annexe 2). Pourquoi, dans le premier cas, la France se situe-t-elle au 23ème rang (assez peu honorable, mais au niveau de l’Allemagne et de l’Espagne) pour des enfants de 15 ans et au 42ème rang (position catastrophique après de nombreux pays en Voie de Développement, dont les PNB/h sont de 4 à 10 fois plus faibles qu’en France), pour les enfants de CM1 ? Ce décalage est inimaginable. Nos enseignants, sont recrutés par concours et au niveau Bac + 5, ce qui ne doit pas être le cas des pays évoqués ici. Ces professionnels de bon niveau ne peuvent être mis en cause, bien évidemment. Les budgets, globalement au-dessus de la moyenne européenne ne sont pas l’explication, non plus.
Ce handicap initial Apprendre sans comprendre (Annexe 4) qui semble se résorber, partiellement, au collège, viendrait-il des tout premiers apprentissages de l’école primaire, Comment nomme-t-on les 100 premiers nombres ? (Annexe 1) La numération conventionnelle dans la langue française et la trop grande importance accordée à la Comptine (décrite dans la lettre DGESCO, Annexe 7) qui a, d’ailleurs, été critiquée par de nombreux scientifiques depuis trente ans, seraient les deux facteurs responsables de ce retard très important, par rapport aux écoliers de tous les autres pays. C’est notre conviction depuis longtemps, confirmée depuis quelques mois par des mesures spécifiques avec des enfants de Grande Section et de Cours Préparatoire.
Au contraire l’approche du nombre, représenté de façon analogique (Annexe 8), ainsi que l’utilisation de la numération de Condorcet TIMSS 2023 (Annexe 3) rendent l’apprentissage « intuitif »; l’appropriation s’effectue très rapidement et définitivement, avec plaisir et sans aucune perturbation pour la numération conventionnelle. Ainsi, nous ne faisons que copier le cadre habituel des apprentissages dans pratiquement tous les pays non francophones, à l’exception des mondes hispaniques et anglo-saxons, beaucoup moins impactés, cependant, par les irrégularités Comment nomme-t-on les 100 premiers nombres ? (Annexe 1). Nos essais ont été effectués, en conformité avec les programmes de GS, CP et de CE1 ; ils confirment cet écart de durée d’apprentissage très, très important entre les deux approches pédagogiques.
Une expérimentation conduite par un laboratoire de recherche sur le sujet serait d’un coût incomparable avec l’enjeu. Nous tenons à votre disposition, et à celle de l’ANR, les résultats de nos expérimentations pour une confirmation ou une infirmation de cette découverte récente ; nous allons la décrire lors d’une conférence organisée le 20 décembre 2024 à Périgueux. Le protocole est simple et il est reproductible par tout un chacun.
Nous vous prions, d’agréer, Madame la Ministre, nos sentiments dévoués et respectueux.
Le bureau
Michel Charles VIGIER Alexia Raguenot
Emilie Laoutid Alain Simoni
Sylvie Nauwelaerts